Carnet de bord

Umiujaq

Damien, 5 avril 2004

Lundi la formation reprend. Les personnes nous posent de plus en plus de questions. J'ai une longue discussion avec Claude Martel qui dépasse très rapidement le cadre de notre formation. Finalement elle m'explique, qu'elle et son mari, ont trouvé le paradis au Québec et que ça fait 10 ans que cela dure. Qu'ils ne sont pas prêts de lâcher le morceau. Leur décision de venir ici s'est presque faite du jour au lendemain. Il leur aura fallu deux années pour s'intégrer complètement, et à présent ils font partie de la grande famille qu'est Umiujaq.

umiujaqAu cours de notre formation, nous abordons des sujets essayant d'intéresser toutes les personnes, afin de leur montrer l'utilité d'Internet. Au cours de ma formation avec Eddie, nous avons pu discuter des objets bizarres qui ornementent son bureau. Finalement les explications sont simples : ils servent pour la plupart au travail et au découpage et à la transformation des peaux. J'aurais bien aimé assister à leur utilisation, mais nous n'en aurons pas le temps.

Les journées passent, nous avons presque fini. Notre départ sera pour jeudi direction Inukjuaq. On ne sait pas ce que Inukjuaq nous réserve comme surprises! Notre mission d'ambassadeurs de l'Internet se finalise par la distribution de nos tapis de souris Soleica. Nous disons: « bye! Bye! », avec une certaine amertume, aux personnes que nous avons côtoyées pendant plusieurs jours. Vite, encore quelques tuyaux à Noah Inakpuk, pour l'utilisation de son nouveau « thin client ». Notre avion est dans 1/2h. Nous arrivons les premiers à l'aéroport. Notre excédent de bagages partira avec nous. Ni une, ni deux, nous sommes dans le petit coucou qui nous amènera à Inukjuaq. Nous avons déjà perdu le golfe de vue. Une autre aventure commence. Malgré un petit peu de nostalgie, face aux nouveaux amis que nous venons à peine de connaître.

Damien, 4 avril 2004

Richmond GulfDimanche, après avoir regardé la météo sur 3 sites web différent, nous en déduisons que l'anticyclone passera à coté de nous; qu'il ne fera pas trop beau et qu'il y aura du vent. Mais nous avons besoin d'un break et de prendre l'air frais. Alors, équipés comme des « bonhommes Michelin », nous partons en direction de Richmond Gulf à pied, vent de face. Mais il ne fait pas froid, c'est un vent du sud alors qu'à Montréal il fait +10, ici ça doit être du +3.

Nous marchons parmi les plaques de glace et de neige, pendant 1h30, pour arriver devant un spectacle fabuleux qui nous fait nous sentir infiniment petit. La vue magnifique du golfe avec ses falaises abruptes tout autour. En bas il y des arbres, d'après Andrew. C'est aussi là que se cachent les tarmaganes que nous avons mangés la veille...de la vraie viande qui a le goût de quelque chose!!! Arrivés à Linuksouk, que nous avions prévu 2h plus tard, le soleil commence à rougir et nous fait comprendre que, malgré le paysage enchanteur, c'est le moment de rentrer si l'on ne veut pas arriver trop tard. Le retour sera plus facile, car vent dans le dos, et en choisissant comme repère le flash de la lumière de l'aéroport. Eh bien, cette petite escapade nous aura fait du bien.

Damien, 1 avril 2004

Vite, vite sont les mots d'ordre avant le départ d'Antoine. En pleine forme, Andrew et moi sommes prêts à voler de nos propres ailes... enfin, on le pense! Les derniers préparatifs, les dernières copies de CD, les derniers cartons, et les jeux sont faits. Nous savons ce que nous avons à faire; reste à aborder les choses de façon diplomatique et efficace. La partie informatique est presque finie, il nous reste la partie la plus humaine je dirai et la plus intéressante sur le plan relationnel: la formation. Les différentes personnes présentes au NV ont des niveaux informatiques très différents, c'est pour cela que je décide de réunir tout le monde dans la même salle pour faire une petite introduction : Qu'est ce qu'Internet? Qu'est ce que le courrier électronique? Combien ça coûte selon son utilisation?

Le vent s'est remis à souffler, et les drapeaux du NV claquent sur les mâts, mais il fait beau et l'ambiance est bonne. Cependant la météo est tellement changeante ici que l'on ne peut prédire ce qui se passera les heures suivantes. Andrew commence les formations ici. Moi je dois aller voir Billy Tooktoo au DC pour faire les dernières mises à jour. Il m'accueille de façon toujours aussi chaleureuse; son humour et son humeur sont très spéciaux. Je me rends compte avec surprise des contrastes exceptionnels qu'il y a entre ce petit village ou tout semble en harmonie, calme et serein et le support exécrable, stressant et impoli que me fournit le service après vente d'un logiciel dont nous recherchons le numéro de série qui se trouve être aux États-Unis!!!

tooktooLes formations continuent, les personnes se confient de plus en plus à nous: la glace est brisée. Finalement deux petites interventions chez Billy et Jack nous permettent de découvrir l'intérieur des logements, qui ont une ressemblance déconcertante. Il n'y a que trois rues à Umiujaq. Finalement pour gagner du temps je m'occuperai de faire la formation support à Eddie, et Andrew s'occupe de Billy. Nous nous retrouvons samedi soir à manger des sandwichs au DC tous ensemble. J'apprends que l'eau ici n'est pas très bonne et que pour les enfants on fait fondre de la neige afin d'avoir de l'eau de meilleure qualité. En ce qui concerne l'eau, mon ventre me l'avait déjà fait comprendre!

Antoine, 24 mars 2004

Alors que dehors c'est ce qu'on appelle ici le "White out", expression colorée qui désigne une forte tempête avec des vents en rafale et de la neige, je m'apprête à plier bagages en direction de Inukjuak, si le temps le permet demain.

Umiujaq est une très belle petite communauté, avec beaucoup de charme, le long d'une côte parsemée d'îles protectrices. La taille du village et les relations entre habitants me donnent aussi parfois l'impression d'une grande famille Inuit où chacun a sa place bien définie.

 

 

Charlie et les rangersLe travail avance de manière efficace dans une bonne ambiance et sans accroc. Nous avons même reçu en cadeau cinq Ptarmigans (perdrix) fraîchement tuées que nous avons déplumées, vidées et mangé presque crues tant la faim nous creusait l'estomac, sous le regard amusé d'Andrew.

Notre voyage coïncidait également avec la venue de deux soldats qui venaient entraîner les fameux Rangers du Nunavik, pour faire des exercices de repérage nocturne sur le Richmond Gulf. Le drapeau rouge flottant accroché à une épinette coincée à l'arrière du skidoo, la troupe faisait belle allure à son retour hier, sous un soleil éclatant et printanier. Dans l'équipe se trouvaient Charlie Tooktoo (agent local du KMHB) ainsi que Noah Inukpuk (employé local de KRG E&T), tous deux de rouge vêtus. Noah, au visage rieur et enjoué, nous a raconté leur périple de 3 jours qu'il a beaucoup aimé même si il trouvait que les soldats étaient bien exigeants quant à la précision des repérages qui se faisaient de nuit et sous le vent. Avec beaucoup d'intérêt, je lui demandais si il avait eu le temps de chasser un peu et il me répondit par l'affirmative: -"oui bien sûr nous pouvions chasser avant 8 heures le matin"

Ce matin, alors que la tempête se levait, j'ai organisé une petite formation sur le travail sans-fil avec Eddie Qumarluk, agent local de KRG pour le projet Internet ainsi que Damien et Andrew. Chacun a pu faire son câble et à midi l'hotel Coop était connectée sur Internet. Quelle équipe !

Antoine, 19 mars 2004

Après les innombrables péripéties politico-techniques qui ont marqué le précédent voyage, c'était avec une certaine appréhension que je retrouvais le village de Kuujjuaraapik, deux jours plus tôt. Pourtant, le soleil brillait de plein feux, l'ambiance était bonne et Andrew, notre nouvel employé de Whapmagoostui, était bien là au rendez-vous avec quelques minutes de retard mais en grande forme.

Les deux journées passées à Kuujjuaraapik ont été bien remplies, en partie grâce à la rencontre que nous avons eue au Band Office Cri de Whapmagoostui. La perspective d'un projet d'installation d'un réseau connecté à l'internet de KRG du côté du village Cri ouvre des portes très interéssantes pour le développement de notre petite entreprise. Dans l'éventualité d'un contrat signé avec le band Office, il ne fait aucun doute que Soleica Inc ouvrira un bureau à Kuujjuaraapik avec Andrew et Jalal que j'ai revu suite à son hospitalisation à Montréal, lui aussi en grande forme.

umiujaq coucher de soleilMais pas plus tard que ce matin, la routine du projet internet a repris ses droits dans un climat de renouveau particulièrement intéressant. Le bon capitaine Duane parti, c'est une équipe remise à neuf qui a débarqué ce matin à Umiujaq après un vol de quelques 25 minutes depuis Kuujjuaraapik.

Mon idée de départ d'associer Damien et Andrew dans une équipe qui allie la compétence technique et la connaissance du terrain me semble être particulièrement prometteuse.

En tous les cas, il n'y avait pas grand monde qui ne connaissait pas Andrew ici à Umiujaq lorsque nous sommes arrivés. «Des personnes que je n'avais pas vu depuis vingt ans» nous confiait Andrew. Cela fait en effet 20 ans que le village de Umiujaq a été créé pour les Inuits de Kuujjuaraapik qui devaient y déménager suite aux accords de la baie James.

 

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